Paul Verlaine (1844-1896)
       Poète français, auteur notamment des Fêtes galantes et de Sagesse, qui fut considéré par les symbolistes comme leur maître.

 

Son oeuvre :

Poèmes saturniens (1866)

Fêtes galantes (1869)

La bonne chanson (1870)

Romances sans paroles (1874)

Sagesse (1881)

Jadis et naguère (1884)

Amour (1888)

Parallèlement (1889)

Bonheur et Chansons pour elle (1891)

Biographie

Né le 30 mars 1844, Paul Verlaine était d'origine ardennaise mais vécut à Paris. Élève au lycée Bonaparte, il embrassa par la suite une carrière d'employé de bureau à la mairie de Paris. Il commença à fréquenter les milieux littéraires, menant une vie répréhensible aux yeux des siens, entre les cafés, où il abusait de l'absinthe, et les amours faciles et décevantes.

Ses premiers recueils de poèmes, Poèmes saturniens (1866) et les Fêtes galantes (1869), sont marqués par l'influence de la poésie parnassienne, même si l'on voit déjà s'y dessiner des traits indéniablement personnels - sensualité, mélancolie, etc. - et tout à fait propres à la poétique verlainienne telle qu'il la décrira ultérieurement dans l'Art poétique (écrit en 1874, publié dans Jadis et Naguère en 1884).

Après sa période d'errance amoureuse, il rencontra une jeune fille, Mathilde Mauté, qu'il célébra dans les poèmes de la Bonne Chanson (1870) comme «!la blanche apparition qui chante et qui scintille!», et en laquelle il pensa avoir trouvé «!l'âme!/!que son âme depuis toujours pleure et réclame!», la fiancée rédemptrice. Mais la réalité du mariage vint rapidement altérer cet enthousiasme!; soupçonné de sympathie à l'égard des communards, il connut à cette époque des difficultés financières et professionnelles qui détériorèrent encore le climat familial. La rencontre du poète avec Arthur Rimbaud, en 1871, vint porter un coup ultime à cette union fragile. Après quelques mois de cohabitation pénible sous le toit familial et quelques scènes violentes, Verlaine choisit de s'enfuir avec Rimbaud, abandonnant femme et enfant. Les deux poètes poursuivirent, en Belgique puis en Angleterre, une relation tumultueuse et passionnée, qui se termina violemment, lorsque Verlaine, au cours d'une dispute, tira deux coups de feu sur Rimbaud, le blessant légèrement. Il fut condamné à deux ans de prison!; c'est dans sa cellule qu'il écrivit les poèmes du recueil Romances sans paroles (1874) sur la période de sa vie commune avec Rimbaud. Rongé par le remords, il y découvrit également la foi. À sa sortie de prison, il composa des poèmes marqués par sa conversion, notamment ceux qui figurent dans Sagesse (publié en 1881). Il mena un temps une vie rangée, mais bientôt ses vieux démons le reprirent. Mathilde l'avait quitté (1874)!; il eut une liaison avec le jeune Lucien Létinois, qui mourut précocement, et se remit à boire. La mort de sa mère, en 1886, finit de le jeter dans la misère.

Il était cependant devenu l'un des écrivains les plus admirés de sa génération, et son influence sur les jeunes poètes, notamment les premiers symbolistes, était déjà grande. On doit encore à Verlaine un important recueil d'études critiques sur Rimbaud, Mallarmé et Tristan Corbière, les Poètes maudits (1884), des recueils sensuels comme Parallèlement (1889) ainsi que, vers la fin de son existence, des œuvres autobiographiques en prose, Mes hôpitaux (1892), Mes prisons (1893) et des Confessions (1895). Il mourut le 8 janvier 1896.

Œuvre

Dans le recueil des Fêtes galantes, Verlaine composa des vers d'une préciosité gracieuse qui pastichent d'un trait léger les hyperboles, les oxymores et les complexités de la rhétorique amoureuse des siècles passés : «!Que je meure, Mesdames, si!/!Je ne vous décroche une étoile!!!», écrit-il dans «!Sur l'herbe!», ou encore, dans un autre poème, «!Là, je me tue à vos genoux!! Car ma détresse est infinie!/!Et la tigresse épouvantable d'Hyrcanie!/!est une agnelle au prix de vous.!» («!Dans la grotte!».)

 
Paul Verlaine

L'atmosphère esquissée par les Fêtes galantes est celle d'un paysage à la Watteau - parcs nocturnes hantés de statues, lieux de rendez-vous galants -, tandis que les noms des amants évoquent directement ceux des romans pastoraux du XVIIe siècle (Tircis, Aminte, Clitandre, Dorimène) ou ceux de la commedia dell'arte (Arlequin, Colombine, Pierrot, Scaramouche, Pulcinella). S'ouvrant sur des évocations joyeusement libertines, mettant en scène des abbés galants, des amants désespérés et des marquises cruelles («!trompeurs exquis et coquettes charmantes!/!cœurs tendres mais affranchis du serment!»), le recueil se referme sur des notes plus sombres, avec des poèmes comme le mélancolique «!Colloque sentimental!» : «!Dans le vieux parc solitaire et glacé!/!deux spectres ont évoqué le passé!».

Les poèmes de la Bonne Chanson sont pleins de l'image charmante de «!la jeune fille!», «!la petite fée!», dont les yeux «!sont les yeux d'un ange!», la fiancée en laquelle s'incarne l'espoir d'un bonheur et d'une rédemption. Les deux recueils suivants, en l'occurrence Sagesse et Amour (1888), marquent quant à eux l'espoir, teinté d'élans mystiques, de retrouver la foi chrétienne.

C'est dans Jadis et Naguère que figure l'Art poétique (écrit en 1874), qui fit de Verlaine le chef de file des symbolistes et qui expose, en vers, les principes de la poétique verlainienne : l'Art poétique prône l'usage des vers courts et des vers impairs, jugés plus musicaux et plus légers. On trouve d'ailleurs, dans tous les recueils de Verlaine, des Fêtes galantes à Sagesse, des vers de onze syllabes ainsi que des heptasyllabes, des jeux d'allitérations et d'assonances («!Et si la sottise l'amuse!/!Elle serait, étant la muse […]!»), un usage fréquent de l'ellipse, qui confèrent aux vers verlainiens leur légèreté : «!Houblons et vignes!/!Feuilles et fleurs!/!Tentes insignes!/!des francs buveurs.!» («!Paysages belges!» in Romances sans paroles).

Ce qu'on appelle la musicalité du vers de Verlaine procède de l'instauration de rapports nouveaux entre les sonorités, qui sont répétées à loisir pour produire l'impression d'une incantation, comme c'est le cas dans «!Ariettes oubliées!» (in Romances sans paroles) : «!Il pleure dans mon cœur!/!comme il pleut sur la ville!/!Quelle est cette langueur!/!qui pénètre mon cœur!? Il pleure sans raison!/!dans ce cœur qui s'écœure!». Ces jeux trouvent certaines de leurs réussites les plus exquises dans les poèmes qui empruntent la forme de la chanson, comme «!À Clymène!», dans les Fêtes galantes, ou «!Ariettes oubliées!», «!Streets!» et «!Aquarelles!», dans les Romances sans paroles. Dans ces poèmes, une strophe ou un vers sert de refrain : «!Dansons la gigue!/!J'aimais surtout ses jolis yeux!/!plus clairs que l'étoile des cieux!/!J'aimais ses yeux malicieux!/!Dansons la gigue!», («!Streets!», in Romances sans paroles). Enfin, dans tous les recueils, on trouve des vers courts, liés à une prosodie qui disloque la syntaxe de la phrase en la répartissant sur plusieurs vers, notamment en multipliant les rejets : «!L'étang reflète!/!profond miroir!/!la silhouette!/!du saule noir!/!où le vent pleure.!» «!Dans l'interminable!/!ennui de la plaine!/!La neige incertaine!/!Luit comme du sable!» (la Bonne Chanson).

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